Bonjour

Fin août, promenade dans Paris quasi vide en cette période Covid, la butte Montmartre est sans touristes.

Au Louxor, très ancienne salle de cinéma, se donne une rétrospective du cinéaste japonais Ozu. Cet après-midi-là, j'entre voir « Bonjour ».

Dans la banalité des scènes de la vie quotidienne, Ozu dépeint les humains avec finesse, et gentillesse. Chaque plan est une splendide photo. Le cinéaste pose un regard tendre, ses personnages sont attachants, la bonté apparait à travers leurs imperfections, petites bassesses et mesquineries.

Dans ce film, deux jeunes frères cessent de parler en forme de révolte silencieuse contre leurs parents qui refusent d’acheter la télévision. En contraste avec le silence des enfants, apparait la langue des adultes, emplie de mots inutiles, superficiels.

Ce film de la fin des années 50, dit quelque chose d'essentiel pour aujourd'hui : la fraicheur des mots inutiles qui révèlent la singularité d’une voix, la subtile teinte d’une émotion, une parole vibrante, une attention douce capable de réchauffer un cœur gelé.

« Le temps est magnifique aujourd’hui», « Vous avez remarqué ce nuage ? Il a une forme étrange ». Des mots prétextes à échanger un regard, une politesse. Dans la banalité de ces petites phrases se tissent des liens, des ponts où se révèlent notre humanité. Ozu fait dire à l’un des personnages : « Ce qui importe le plus est toujours inutile ».

Le titre du film : « Bonjour », emblème de ces petits mots au grand pouvoir d’animer un regard, d’esquisser un sourire, de diffuser, par la mélodie des voix, une douceur invisible.

Dans le métro, ou dans une file d'attente, je me lance parfois des mini défis : sourire à quelqu’un, dire quelques mots anodins. Je sens battre mon cœur plus vite, mais je me lance. Juste parce que ça fait du bien, sans raison. Je vous souhaite une journée faite d'attentions légères.

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